JEAN M.  ET HENRIETTE Grimal

Jean dit Omer (1849-1931)

Valentine Daudirac (1961-1936)

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          Louise (1877-1954)                           Jean (1879-1962)

          René Ancely (1876-1966)                henriette Grimal (?)

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Valentine (1902)       Georges (1907)              André (1920-1948)


André Moulonguet écrit (dans les années 1968) :

Second enfant d’Omer Moulonguet et de Valentine Daudirac, Jean naquit à Vidouze le 29 novembre 1878. Lui aussi commença ses études avec Mlle Antoinette. Puis il fut mis au lycée de Tarbes puis à Toulouse. Il fut un très mauvais élève, traînant parmi les derniers de sa classe. En sortant de la troisième ses parents firent venir de Toulouse un répétiteur qui le fit travailler pendant deux mois puis déclara : « Cet enfant est très intelligent ; confiez-le moi et je le présenterai au bachot l’an prochain » Ainsi fut fait et l’année suivante, Jean fut reçu à son bachot de philo à 16 ans.

 

Entre temps c’était devenu un magnifique garçon d’1m80, bâti en athlète, et d’une force peu commune. Par son intelligence et sa mémoire il était certainement le mieux doué des Moulonguet de sa génération. Malheureusement il était paresseux et manquait de volonté. On décida qu’il ferait sa médecine à Toulouse sous la surveillance de ses oncles et tante Privat. Il travailla tout juste ce qu’il était nécessaire pour passer ses examens mais il fréquentait beaucoup plus les cafés que la faculté. Il excellait au billard et au bridge. Il était un habitué du Sénat, la grande maison spéciale (ndlr : ou maison close) de Toulouse, et un jour la patronne lui dit : « Voilà Jean, j’ai eu la visite d’un type qui ne peut pas avoir d’enfant avec sa femme. Il voudrait qu’un beau garçon fasse un enfant à sa femme, et il y met deux conditions : que sa femme ait un voile sur la figure, et que lui soit dans la pièce d’à côté. Je t’ai choisi… » C’est ce qui fut fait, mais on ne connaît pas la suite de cette saillie.

 

Jean était pour nous le grand cousin parfait, toujours prêt à nous rendre service, organisant nos jeux pendant les vacances. C’est avec lui que nous fîmes nos premières courses en montagne. Il était un merveilleux boute-en-train. Lisant beaucoup, il était très cultivé. 

 

Ses longues années d’études terminées il s’installa à Cauterets pour prendre la suite de son grand-père le Dr Daudirac. Sa gentillesse plaisait à sa clientèle qui augmentait chaque année depuis son installation en 1908. En octobre 1911 il vint à Paris et dîna avec moi aux Enfants Malades. Il paraissait préoccupé et m’emprunta 20 francs…Un mois plus tard, mon père et tonton Omer débarquent à Paris et m’apprennent qu’on est sans nouvelle de Jean depuis trois semaines et qu’on a prévenu la police qui le recherche. M. Dupuy, directeur du parisien, député des Hautes Pyrénées, a promis à tonton Omer, son fidèle électeur, de faire pression sur la police pour qu’elle active ses recherches. Comme j’étais un des derniers à l’avoir vu, deux policiers sont venus m’interroger ; j’apprends que pendant cette dernière saison, Jean s’était amouraché d’une actrice du casino, avait gaspillé de l’argent pour elle et avait laissé de grosses dettes à Cauterets. Quelques jours après, paraît dans le Petit Parisien, avec heureusement le nom écorché : «  Le docteur Maubourguet a-t-il été assassiné ? ». Quelques jours plus tard l’angoisse familiale cessait : une lettre de Jean annonçait qu’il avait quitté la France et était chez son ami le Dr de la Joncquière installé à Bougie comme stomatologiste, qui lui apprenait le métier. Un an après, il s’installait à Alger où, grâce à son habileté manuelle et à sa gentillesse, il réussit brillamment .

 

A la fin de la première guerre, il épousa Henriette, une divorcée habitant Alger dont il eut un fils qui mourut de tuberculose vers 18 ans pendant que mon fils Maurice était en Algérie. Il s’appelait André ! Le premier mari d’Henriette étant mort, ils purent plus tard se marier religieusement.

 

Lors de son premier voyage au pays après la première guerre, j’ai été surpris quand Jean, tirant un carnet de sa poche, me dit : « Je t’avais emprunté avant la guerre 20francs, je te les rembourse au cours du jour », et il tire plusieurs billets de sa poche… J’avais bien oublié cet emprunt !

 

Bien qu’Henriette fût d’un milieu social assez médiocre et peu intelligente, elle rendit son mari très heureux et le soigna admirablement au cours de ses années de vieillesse. Loulou Ancely souffrit de l’introduction dans la famille de cette belle-sœur d’un milieu social inférieur, et cette hostilité fit souffrir Jean ; puis les choses se tassèrent… Les Jean quittèrent heureusement l’Algérie vers 1955 avant la grande crise de 1958 et se retirèrent à Pau où ils firent construire la villa André chemin de Buros, dans un nouveau quartier en plein développement.

 

Jean était devenu un grand emphysémateux, toujours essoufflé. Lui qui avait été champion de bridge d’Algérie, n’a plus joué à Pau. Il ne jouait plus qu’en famille, au pays, et souvent il interpellait sa sœur Loulou avec véhémence : « Il n’y a qu’une seule carte que tu ne joues pas au hasard, c’est la dernière ! ».

 

Jean, qui, comme Camille Dussaud, était longtemps resté indifférent aux choses de la religion, est devenu profondément croyant dans ses dernières années. Il avait gardé sa belle mémoire, restant un puriste du langage français et partageant notre anti-gaullisme. Il s’est éteint à Pau le 15 mai 1962.